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Jérémy L.
28 novembre 2017

Le design minimaliste

Ces deux créateurs de mobilier n’ont pas seulement en commun d’être nés au Japon, mais d’avoir porté « à son comble presque jusqu’à la fêlure, la tension qui relie la fonction et la forme ». Cette citation de Matthias Dietz et de Michael Möenninger dans Japan Design (Taschen, 1992) résume le travail de Shiro Kuramata (1934-1991), mais pourrait englober également celui de Rei Kawakubo, la créatrice de mode qui se cache derrière la marque Comme des Garçons. Deux expositions, dans deux très jeunes galeries parisiennes, l’illustrent avec brio. Shiro Kuramata est un « poète du vide créatif ». La galerie Wauthier, ouverte en juillet à Paris, rend hommage au premier, l’un des plus grands designers japonais du XXe siècle, figure du design post-moderne. Avec une vingtaine d’œuvres – dont l’iconique fauteuil en treillis métallique « How High The Moon » (1986) ou plusieurs commodes aux multiples tiroirs –, l’exposition fait la part belle à la poésie de Kuramata. La part du lion, aussi, aux années 1980, quand il a rejoint le mouvement Memphis, à Milan, sur l’invitation du maestro Ettore Sottsass. Il a 47 ans, n’a plus que dix ans à vivre, mais va imaginer des objets plus aériens et jubilatoires que jamais. Table en terrazzo dont le plateau semble léviter au-dessus du pied (1983), « chaise A » (1983) où seuls les accoudoirs soutiennent l’assise, comme flottant dans l’espace, ou cintres colorés suspendus au plafond – à la manière du mobile « Obstruction » de Man Ray (1920) : Kuramata est ce « poète du vide créatif qui a enrichi les théories modernes du Bauhaus occidental d’éléments surréalistes et minimalistes et les a propagées dans le système de pensée asiatique », analysent Matthias Dietz et Michael Möenninger. « C’est un minimalisme généreux aux formes rondes, aux couleurs franches, ponctué de magie », renchérit Jean-Roland Campion, le jeune homme à la tête de la galerie Wauthier. A la vie et la sensualité qui caractérisent le travail de Kuramata s’oppose la rigidité, la froideur industrielle, de Rei Kawakubo dont une vingtaine de pièces de mobilier, rarissime, est présentée par la galerie A1043, ouverte à Paris en 2016. « Dans ses premières boutiques tokyoïtes en 1981, elle proposait un univers vide, un espace aux sols bruts et murs en béton », rappelle l’artiste plasticien Didier Jean Anicet Courbot, fondateur avec la paysagiste Stéphanie Laurent Courbot de ce nouveau lieu artistique. « Les vêtements étaient cachés, le client devait demander à les voir et les essayer. » Ses meubles, destinés à l’origine à ses magasins, sont aussi déstabilisants. Hérissés de piques, avec chaînes d’acier en guise de dossier, grille métallique ou triangle étroit pour assise…, ces chaises brutes, voire brutales, n’ont rien d’accueillantes, ni de confortables. « Rei Kawakubo souhaitait que les gens passent, ne se posent qu’un instant, dans une vision de la ville en mouvement, d’un mobilier en transit », explique Didier Jean Anicet Courbot qui a mis trois ans à rassembler ces pièces intrigantes, principalement en métal sablé puis zingué. Elles sont mises en scène sur fond blanc, dans une esthétique des années 1980, sous des néons fluorescents façon aéroport ou parking.

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