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Jérémy L.
25 août 2016

Le développement de la sécurité privée

Faute de personnel formé et en nombre suffisant, le secteur privé peine à satisfaire la demande de protection.Faute de personnel formé et en nombre suffisant, le secteur privé peine à satisfaire la demande de protection. En mal d'effectifs, l'Etat prône une coopération public-privé accrue, tandis que les entreprises de sécurité, cantonnées par la loi à des missions subalternes, exigent davantage de pouvoirs pour leurs agents. Une redéfinition des frontières s'ébauche. Des dizaines de milliers d'agents de sécurité à l'entrée des magasins et des salles de spectacle... Quasiment autant de militaires et de fonctionnaires de police sur le qui-vive depuis des semaines. Comment faire pour que ces univers si différents coopèrent alors qu'ils se sont ignorés pendant des décennies? Il y a un peu plus d'un an, le ministre de l'Intérieur a mis les pieds dans le plat lors des assises de la sécurité privée: "L'Etat et le secteur des activités privées de sécurité doivent aujourd'hui dépasser la méfiance et l'incompréhension réciproques qui ont longtemps caractérisé leurs relations", lançait Bernard Cazeneuve, tout en promettant une série de réformes portant sur le périmètre des interventions, les conditions d'exercice, la formation et la coordination. Face aux besoins de sécurisation, les enjeux sont considérables. "Depuis vingt ans, la polémique règne sur les frontières respectives: l'Etat décide du périmètre des activités du privé et veut aujourd'hui externaliser de plus en plus de dossiers", décrypte Patrick Haas, fondateur des publications spécialisées "En toute sécurité". Un chantier d'autant plus complexe que le monde de la sécurité privée est atomisé et précaire. Sans compter les 6000 artisans et autoentrepreneurs, "Le secteur compte près de 3600 sociétés, mais les trois quarts du chiffre d'affaires global sont réalisés par 240 entreprises de plus de 100 salariés", rappelle Pierre Brajeux, président de Torann-France et du Medef Hauts-de-Seine. Surtout, une majorité d'entre elles affiche des marges très faibles - souvent inférieures à 1% - et, depuis quelques années, le nombre de défaillances n'a jamais été aussi élevé. Bien qu'exposé aux risques, le métier d'agent de sécurité reste une profession "par défaut", mal payée (au-dessous du smic pour les plus mal lotis), minée par un turnover de 70% et par l'absence d'encadrement intermédiaire. Réclamé de longue date par la profession elle-même, un travail de moralisation et de régulation du privé (régi par la loi de 1983, appelée Livre VI du Code de la sécurité intérieure) est en cours depuis la création du Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps), en mars 2011, un établissement public à caractère administratif. "Bon an mal an, tout un travail de mise en cohérence d'ensemble de la répartition des missions et des territoires entre privé et public est désormais à l'oeuvre." estime Alain Bauer, président du Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps)."Bon an mal an, tout un travail de mise en cohérence d'ensemble de la répartition des missions et des territoires entre privé et public est désormais à l'oeuvre." estime Alain Bauer, président du Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps).AFP PHOTO/PHILIPPE DESMAZES "Outre sa fonction de conseil et de valorisation de la profession, le Cnaps délivre ou retire les agréments, autorisations et cartes professionnelles", explique son président, Alain Bauer. Sur les 1500 entreprises contrôlées en moyenne par an depuis 2012, plus de 1000 sanctions ont été prononcées. Motif: "Certaines entreprises oublient de se faire agréer ou de déclarer les salaires", s'agace Alain Gardère, directeur du Cnaps. Non sans atermoiements et embûches, les premières briques institutionnelles d'une coopération structurée entre privé et public se mettent en place. Ainsi, une Délégation aux coopérations de sécurité a été créée le 28 février 2014. Son délégué, Thierry Coudert, souligne: "Dans le cadre de la réforme annoncée il y a un an, une circulaire sur la coopération privé-public devrait voir le jour début 2016." Sur le terrain débutent des expériences de coopération et de transmission d'expérience entre policiers de sécurité publique et agents de sécurité privée. C'est le cas de l'opération Vigie, à la Défense, inspirée du Project Griffin né il y a une dizaine d'années à la City de Londres (formation aux réactions en cas d'attentat, modalités des échanges d'information). Bon an mal an, "tout un travail de mise en cohérence et de répartition des missions et des territoires entre privé et public est désormais à l'oeuvre", relève Alain Bauer, du Cnaps. Reste que deux grandes questions se posent. La sécurité privée peut-elle intervenir de façon moins exceptionnelle qu'actuellement sur la voie publique? Et faut-il armer une partie des agents de sécurité privée, et à quelles conditions? A la suite des attentats du 13 novembre, le collège qui dirige le Cnaps a émis plusieurs recommandations, dont "la création d'un métier d'agent de surveillance renforcée (ASR), dédié à des espaces statiques particulièrement exposés à des risques, et pouvant être autorisé à être armé dans les mêmes conditions que les transporteurs de fonds". Pour nombre de dirigeants du privé, armer leurs agents représente une lourde responsabilité. "A peine 8000 à 10000 agents triés sur le volet, sur les quelque 160000 que compte la profession, seront peut-être armés demain, sur une centaine de sites ultrasensibles", pronostique Patrick Haas.

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